Le dossier d’une victime de viol traîne encore sept ans plus tard

Le dossier d’une victime de viol traîne encore sept ans plus tard

MISE À JOUR 

 

Une femme de 40 ans dont toute l’enfance a été teintée par des agressions sexuelles quasi quotidiennes et de la violence se bat depuis bientôt sept ans pour recevoir une indemnisation qui lui permettrait de sortir la tête de l’eau et commencer à vivre.

FRÉDÉRIQUE GIGUÈRE
Journal de Montréal

PHOTO D’ARCHIVES, PIERRE-PAUL POULIN L’avocat Marc Bellemare (à droite) ne compte pas baisser les bras jusqu’à ce que sa cliente, Martine Legault, soit prise en charge « convenablement » par l’Indemnisation des victimes d’actes criminels. Ils avaient déjà rencontré Le Journal à l’été 2017.

Martine Legault a été agressée à répétition par son beau-père entre l’âge de 8 et 13 ans.

« Quand j’ai finalement réussi à sortir de cette maison-là, je ne me suis pas mise à aller mieux, j’étais complètement fuckée et j’ai pris plein de mauvaises décisions, admet la femme. J’ai été en colère toute ma vie. »

Ayant passé de nombreuses années à entretenir une haine infinie à l’égard de son violeur, elle a finalement trouvé le courage de porter plainte contre lui en 2012.

L’homme de 68 ans est toutefois décédé d’une crise du cœur huit heures avant son enquête préliminaire.

Peu de temps après, elle a entrepris des démarches auprès de l’Indemnisation des victimes d’actes criminels (IVAC).

Dans le cadre de ce processus, le psychiatre Charles-Henri Massac a déclaré qu’elle souffrait d’une grave névrose et qu’elle était non fonctionnelle.

Malgré ce rapport, qui n’a jamais été contesté à ce jour, l’IVAC «se traîne les pieds» et fait tout en sorte pour que Mme Legault se décourage, estime son avocat, Marc Bellemare.

« Comme une moins que rien »

« Comme toutes les autres victimes dont je m’occupe, elle est traitée comme une moins que rien », indique l’ancien ministre de la Justice.

Au terme de plus de quatre ans de démarches, d’une décision au Tribunal administratif ainsi qu’à la Cour suprême et d’innombrables demandes de révision, Mme Legault a finalement reçu un montant rétroactif pour toutes les années où elle n’avait pas été indemnisée.

Malgré l’importante somme d’environ 150 000 $, la victime n’a pas pu voir la couleur de l’argent bien longtemps puisqu’elle cumulait d’importantes dettes et devait payer ses frais d’avocat.

Après avoir envoyé l’argent, l’IVAC a informé Mme Legault qu’elle lui verserait désormais une indemnité équivalant à 45 % du salaire minimum de l’époque où elle avait été agressée. En fin de compte, elle reçoit moins de 600$ par mois.

Moins que l’aide sociale

« Je recevais plus que ça lorsque j’étais sur l’invalidité ou sur l’aide sociale, s’indigne-t-elle. Là, je dois décider chaque mois si je paye mon loyer ou si je mange. »

Les décisions prises par l’IVAC sont complètement ridicules et inacceptables, juge Me Bellemare, qui a l’intention de se battre aux côtés de sa cliente jusqu’à ce qu’elle reçoive «ce à quoi elle a droit».

« Le rapport du psychiatre est clair : Martine est invalide à vie. Elle ne sera jamais capable de travailler. Elle devrait recevoir 100 %, et pas du salaire minimum de l’époque, mais bien du salaire minimum d’aujourd’hui. »

Contacté par Le Journal, l’IVAC n’a pas souhaité émettre de commentaire, indiquant que le dossier était confidentiel.